Aubrac, les passereaux du chemin

L'éleveur, le berger, le pèlerin ou le randonneur qui s’intéresse aux oiseaux n'est jamais seul en Aubrac, même au cœur des immenses pâturages. Une foule de passereaux les accompagnent, volettent alentours et lancent, plus ou moins discrètement, leur chant à qui veut bien les entendre. Ils sont indissociables du paysage, fort beau au demeurant. Petit aperçu, en ordre dispersé et sans parti pris:

Pour commencer, le Tarier des prés (Saxicola rubetra) n'est sans doute pas celui que l'on remarque le plus fréquemment, mais il aime bien se percher sur les plantes, gentianes jaunes ou comme ici cet arbuste que je ne connais pas (merci de me laisse un message si vous le connaissez !).

Un des plus beaux passages sur le GR60/670 entre Aubrac et le col de Bonnecombe, au pied du Mailhebiau (le sommet du massif avec ses 1461m), le le refuge privé des Rajas, blotti au pied d'un chaos rocheux.

La plus bavarde, l'alouette des champs (Alauda arvensis) ! On l'entend bien plus qu'on ne la voit. Adepte du vol en chandelle, elle s'époumone haut dans le ciel, au-dessus de nos têtes, si haut qu'on ne peut plus la voir. Puis elle se laisse tomber en vol plané jusqu'à son perchoir... pour mieux recommencer.

Le village d'Aubrac (1316m) et l'ancienne Domerie plantent très bien le décor et l'ambiance de ces hautes terres. Sur l'hôpital médiéval et le monastère, voici ce que dit Laurent Fau dans un article trouvé sur Persée (*). Quelques lignes qui synthétisent très bien tout ce que j'ai pu lire sur le sujet.

"Le climat rigoureux de ce pays a toujours suscité auprès de ses habitants un sentiment à la fois de crainte et de fascination, chaque printemps donnant lieu à la transformation d'un pays hostile et redouté en de superbes pâturages. De nombreux récits mentionnent ainsi les personnes victimes de tempêtes de neige, à commencer par la légende d’Adalard, comte de Flandre, qui lors de son pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle au XIIe siècle fut sauvé tour à tour du froid, des brigands et des loups en Aubrac. Pour remercier le ciel, il fit construire un hôpital en ce lieu hostile. Ainsi, le son de la cloche des perdus de l'église d'Aubrac permettait de guider les malheureux voyageurs pris dans « la tourmente », pour qu'ils puissent se réfugier à la Domerie.

Ce monastère, implanté sur le plateau, venait en aide aux pèlerins qui parcouraient le chemin du Puy à Saint-Jacques-de-Compostelle, au même titre que l'hôpital de Roncevaux. Lors de l'établissement définitif du monastère au début du XIIIe siècle, le pèlerinage entre déjà dans sa phase de déclin. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l'assistance aux pèlerins, fonction première de la Domerie, n'a en fait jamais connu une grande ampleur. En revanche, la gestion des pâturages de montagne par l’abbaye a permis de développer sur le plateau une mise en valeur des terres associée à l'organisation d'une importante transhumance qui a perduré jusqu'à nos jours." (*)

De fortes chances donc que les habitants du plateau et les pèlerins du moyen âge se soient amusés, comme nous aujourd'hui, à voir le Traquet motteux (Oenanthe oenanthe) voleter de cailloux en piquet au-devant d'eux sur le chemin. Font-ils cela par jeu ou pour surveiller l'intrus qui traverse leur territoire ? Qui sait ?

Le buron de La Baysse Haute, au nord du lac de Born. Au-delà de la colline (1276m), non pas l'océan, mais à perte de vue les pâturages du plateau qui descendent en pente douce vers l'Est.

Le discret mais élégant Tarier Pâtre (Saxicola rubicola) garde ses distances. Bien nommé, il n'est jamais bien loin du troupeau.

Nasbinals, à 1180m d'altitude, et sa magnifique église du XIème et XIIème siècles. Chaque automne, le village est au coeur du festival Phot'Aubrac, qui réunit des passionnés de photographie avec des expositions et conférences dans les environs et un peu partout sur le plateau. Prochaine édition du 17 au 20 septembre (croisons les doigts!).

Enfin, l'un des plus fidèles, avec le traquet et l'alouette, le Pipit farlouse (Anthus pratensis) n'est jamais bien loin.

Il en manque beaucoup bien sûr, bergeronnettes, moineaux, linottes, faucons, milans, buses et tant d'autres... mais pour ça, il faudra y aller voir par vous-même !  

Plateau de l'Aubrac, du 5 au 11 juillet 2020 - Parc Naturel Régional de l’Aubrac

(*) Fau Laurent. Les monts d’Aubrac : approches d’un habitat médiéval montagnard. In: Archéologie du Midi médiéval. Tome 21, 2003. pp. 171-182; doi : https://doi.org/10.3406/amime.2003.1409 https://www.persee.fr/doc/amime_0758-7708_2003_num_21_1_1409

(**) Le programme de Phot'Aubrac 2020