Lautaret, l’ancien hospice-refuge et l’hôtel des Glaciers
Petit retour en 2016 : Le col du Lautaret, on ne fait bien souvent qu’y passer. Je crois bien d’ailleurs que je ne m’y étais jamais arrêté avant ce soir-là !
Pourtant cet hospice me faisait toujours de l’œil en passant. Discret mais imposant, austère mais attirant… Ce jour-là, il se cachait derrière son mur de neige glacé, amoncelée par les chasse-neige de La route de Grenoble à Briançon (depuis la neige a enfin recouvert les sommets).
Ce n’est pas encore cette fois que l’on pourra le visiter. En été le parc National des Ecrins y tient un bureau d’information, mais en hiver …, c’est porte et volets clos.
Hospice dit «Refuge Napoléon » comme indiqué sur la plaque datant de 1957 visible sur la façade du bâtiment.
En fait, il ne fait pas partie des six refuges dits « Napoléon » érigés en 1856 « pour y accueillir les malheureux surpris par la tourmente, ou arrêtés par les avalanches » grâce à un don de Napoléon III au département des Hautes-Alpes pour honorer l’un des vœux testamentaire de son oncle, Napoléon Bonaparte. Voir un récit à priori bien documenté ici : source JP. Jaubert.
Ce refuge-là a été créé, quelques années plus tard entre 1860 et1863 (Bernard Amouretti indique dans son livre « Les hommes de la route » : « L’administration ouvre en 1863 au col du Lautaret un refuge qui existe encore »).
Après tout, il se trouve bien sur la route Napoléon, alors pourquoi pas l’appeler comme ça.
Très spartiate, le refuge était géré par un cantonnier-chef. Devant les plaintes des usagers et le manque d’entretien de l’établissement, l’administration confie sa gestion à Alexandre Bonnabel en 1880. Il va améliorer l’accueil et transformer le lieu, puis se trouvant à l’étroit, il va construire en 1897, juste en face, de l’autre côté de la Route Nationale 91, le premier grand hôtel du col, l’hôtel des Glaciers. C’était à cette époque le grand développement du tourisme et de l’alpinisme.
Tout cela est décrit avec passion dans le livre de S.Aubert et A. Bignon «150 ans de tourisme au col du Lautaret » (que l’on trouve à la bibliothèque Kateb Yacine de Grenoble), une histoire animée et passionnante.
L’hôtel des Glaciers, ou hôtel Bonnabel est toujours là, devant le refuge. C’est aujourd’hui un bâtiment moderne, hôtel 4 étoile dans lequel nous n’avons jamais mis les pieds (peut-être un jour…). Plutôt sympathique, c’est toujours la famille Bonnabel qui l’anime, 120 ans après sa création.
Un peu étrange cette ambiance, entre route nationale, station de ski et lieu chargé d’histoire du tourisme alpin.
On trouve sur le site du jardin alpin (créé en 1899) des images des explorateurs Scott et Charcot devant le refuge et l’hôtel. Venus en mars 1908 chercher la neige pour des essais d’engins ultra-modernes (à l’époque) pour une expédition polaire. Voir ici ! Emouvant non ?
Il existe encore une trace de l’ancien hôtel, au lieu-dit « l’Etret », à 1815m. On peut encore lire sur une veille bergerie une publicité pour l’hôtel, d’origine pour sûr… ! Encore une trace du passé qui s’efface petit à petit, inexorablement…il faut en profiter tant qu’elle est lisible.
L’ancien hospice de la Madeleine et sa chapelle se trouvent dans le creux du vallon, un peu plus haut, au pied de la végétation que l’on distingue sur l’image. Je n’y suis jamais allé, encore une idée de balade pour une prochaine fois !
Col du Lautaret, Samedi 31.12.2016 16h-16h20
Ps : Pour revenir à l’ancien refuge, M. Barfety présente dans un article de «La Bibliothèque Dauphinoise» un petit (mais très beau) tableau de l’abbé Guétal qui a croqué l’édifice en 1883. Alexandre Bonnabel était donc déjà le gérant des lieux et a peut-être rencontré le peintre, mais l'hôtel des Glaciers ne sera construit que 14 ans plus tard...
Ps 2 : Je ne résiste pas à reproduire ci-dessous un trop court extrait d’un récit d’Alpinus qui raconte sa folle poursuite dans les écrins de l’alpiniste américaine Miss Brevoort, avec notamment son passage par le Lautaret. Récit vécu ou rêvé, je me demande… mais je ne peux que vous inciter à lire Alpinus, c’est un régal.
Extrait de « Alpinus, conteur dauphinois» de Raymond Coche, ed. Flammarion 1946